Donner les moyens à l’enseignement agricole est essentiel pour réussir la transition agro-écologique

Au regard de l’urgence climatique couplée aux crises sanitaires à répétition de ces 30 dernières années, la transition agroécologique de l’agriculture est devenue une impérieuse nécessité, cela tant pour l’environnement que pour la société en général et pour les agriculteurs eux-mêmes.

 Le pari de la relocalisation d’une production alimentaire, pourvoyeuse d’emplois est gagnable, à condition de faire le choix assumé d’une transformation de la formation initiale et continue et de son financement. A défaut, les futures générations d’agriculteurs et ceux, qui aujourd’hui engagent  leur reconversion, ne seront pas en capacité d’incarner un nouveau modèle de production. Sachant que sous 10 ans, ce ne sont pas moins d’un tiers des agriculteurs qui seront partis à la retraite !

 L’agroécologie, c’est aussi un retour de l’emploi agricole. Le nombre d’actifs dans le secteur agricole est passé de 957 000 en 2000 à 716 000 en 2015 et il continue à chuter dramatiquement. Or la transformation agroécologique du modèle agricole telle que prévue dans le scénario Afterres2050 par exemple, projette un solde net de 150 000 emplois dans quinze prochaines années sur l’ensemble de la chaîne agro-alimentaire. D’ores et déjà l’agriculture biologique crée des emplois : 49 200 entre 2012 et 2017 (source Ministère).

 Les établissements agricoles publics, leurs exploitations et leurs ateliers technologiques doivent, en plus des campagnes de communication ministérielles utiles, impérativement pouvoir disposer des moyens suffisants pour accueillir de nouveaux élèves, étudiants, apprentis, stagiaires adultes et être pleinement en capacité de remplir leur mission d’outils publics de formation, au service du développement d’une agriculture agroécologique et territoriale, qu’elle soit rurale, urbaine ou périurbaine.

 La demande sociétale est là, reste maintenant, au-delà des slogans, à accompagner comme il se doit un monde agricole qui ne demande pas mieux que de vivre à nouveau de son travail. Le temps presse, « au nom de la terre », de retrouver le sens premier du beau métier de paysan, celui « qui habite le pays », qui y vit, qui s’occupe des travaux de la terre et qui façonne son environnement (et indirectement le paysage) par ses différents prélèvements, apports, aménagements, et plantations. Fort d’une « chaîne du savoir », le paysan a la faculté de créer un ensemble d’outils, de bâtiments, de cheptels viables pour lui, sa famille et in fine pour la société.

Ces paysans, soucieux de transmettre un patrimoine commun aux générations futures, sont probablement plus « modernes » que ceux qui persistent à être des « entrepreneurs agricoles », tenants d’une agriculture industrialisée  qui parvient de moins en moins à offrir un revenu décent aux agriculteurs et à repousser les limites sociales et écologiques qu’elle a elle-même engendrées. Une agriculture alternative, clairement inspirée de principes écologiques cohérents, existe. Cette agriculture est aussi citoyenne et territoriale, non délocalisable et de qualité. Elle recrée des relations de proximité avec le consommateur, réinvente les solidarités locales et participe à la vie du « pays ».

 Les paysans,  plus que tout autre groupe social, contribuent au bon fonctionnement de la biosphère. Une tâche qui nécessite l’appui de l’ensemble de la société. C’est d’un projet politique global dont nous avons besoin afin de soutenir les agricultures paysannes et familiales qui ne constituent, pour l’heure, que des solutions locales à un désordre global – comme le rappelle Coline Serreau dans son documentaire de 2010, Solutions locales pour un désordre global.

 L’agriculture de demain est  une agriculture éthique, à l’écoute des demandes citoyennes, respectueuse des écosystèmes, de l’homme et de l’animal, résiliente face aux changements climatiques et source de richesses pour les territoires. Une agriculture où les paysans y retrouvent une place centrale, la fierté de nourrir les citoyens tout en respectant la Nature. L’urgence est donc d’amorcer une transition agricole ambitieuse, en s’attelant au renouvellement des actifs agricoles.

 Pourtant dans le cadre du Projet de Loi de Finances 2020, le schéma de suppression d’emplois 2019-2022 dans l’enseignement agricole est en passe d’être confirmé ! 2018 fût une année sans aucune création de postes. Elle fait suite à cinq ans de rétablissement partiel après sept années de destruction de plus de 1200 postes. La rentrée 2019 s’inscrit dans une tendance baissière (-50 emplois) derrière laquelle se joue le bon fonctionnement des établissements et la capacité à assurer un enseignement public de qualité.

 Il est de la responsabilité de la représentation nationale de garantir les moyens publics nécessaires pour réinstaller des paysans, leur redonner de l’autonomie, de la valeur ajoutée sur les fermes, du lien social et un « savoir-faire » qui valorise les « services environnementaux » offert par la Nature. La « première pierre » à l’édifice d’un modèle agroécologique réside dans la formation des générations à venir et l’accompagnement de ceux et celles qui cultivent, élèvent, nourrissent et ont décidé de revoir profondément leurs pratiques en misant sur la qualité, sur la conversion au bio.

Cette tribune est un appel que nous, conseillers/ères régionaux/ales, lançons aux député.e.s et sénateurs/trices en charge des choix budgétaires de notre pays, par-delà les clivages partisans. À l’heure où les effectifs de cette rentrée repartent à la hausse (avec plus de 750 élèves et étudiants), nous demandons le renforcement des emplois dans l’enseignement agricole public, celui-ci relevant de l’intérêt général.

Tribune à l’initiative de Charles Fournier (Centre-Val de Loire) et Sophie Bringuy (Pays de la Loire),  co-animateurs de la coordination des élus régionaux écologistes

Les signataires : Anne-Marie Almoster-Rodrigues (Nouvelle-Aquitaine), Dominique Amiard (Pays de la Loire), Tania André (Centre-Val de Loire), Geneviève Barat (Nouvelle-Aquitaine), Julien Bayou (Ile-de-France), Frédéric Beatse (Pays de la Loire) Anne-Laure Bedu (Nouvelle-Aquitaine), Maryline Beyris (Nouvelle-Aquitaine), Olivier Biencourt (Pays de la Loire), Benoît Biteau (Nouvelle-Aquitaine), Boris Bouchet (Auvergne-Rhone-Alpes), Katia Bourdin (Nouvelle-Aquitaine), Sophie Bringuy (Pays de la Loire),Céline Brulin (Normandie),  Judith Carmona (Occitanie), Patrick Cases (Occitanie), Christophe Cathus (Nouvelle-Aquitaine), Florence Cerbaï (Auvergne-Rhône-Alpes), Jean-Pierre Charles-Guimpier (Centre-Val de Loire), Jean-Claude Charrier (Pays de la Loire), Pierre Cheret (Nouvelle-Aquitaine), Christophe Clergeau (Pays de la Loire), Cyril Cibert (Nouvelle-Aquitaine), Delphine Coat-Prou (Pays de la Loire), Estelle Cochard (Centre-Val de Loire), Maryse Combres (Nouvelle-Aquitaine), Éric Correia (Nouvelle-Aquitaine), Jean-Jacques Corsan (Nouvelle-Aquitaine), Nicolas Cossange (Occitanie), Monique Cosson (Auvergne-Rhône-Alpes), Thierry Cotelle (Occitanie), Françoise Coutant (Nouvelle-Aquitaine), Christelle de Crémiers (Centre-Val de Loire), Guillaume Cros (Occitanie), Joël Crotté (Centre-Val de Loire), Cécile Cukierman (Auvergne-Rhone-Alpes), François Damerval (Ile-de-France), Raphaël Debû (Auvergne-Rhône-Alpes) Nathalie Delcouderc-Juillard (Nouvelle-Aquitaine), Benjamin Delrieux (Nouvelle-Aquitaine), Sandrine Derville (Nouvelle-aquitaine), Maurice-Claude Deshayes (Nouvelle-Aquitaine),  Christophe Dougé (Pays de la Loire), Pascal Duforestel (Nouvelle-Aquitaine), François Dufour (Normandie), Christian Dumas (Centre-Val de Loire), Emilie Dutoya (Nouvelle-Aquitaine), Lucie Etonno (Pays de la Loire), Benoît Faucheux (Centre-Val de Loire), Vincent Feltesse (Nouvelle-Aquitaine), Charles Fournier (Centre-Val de Loire), Nathalie Franck (Nouvelle-Aquitaine), Lionel 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